Avez-vous déjà pris contact avec la communauté esport de votre ville ?
L’exercice est plus difficile qu’il n’y paraît, car l’esport, c’est avant tout une communauté en ligne.
Aujourd’hui, regarder un match d’esport hors de chez-soi est possible. L’initiative n’est pas nouvelle, elle existe depuis 2012, lancée avec le Meltdown. On la connaît aujourd’hui sous le terme de bar esport.
Il y a quelques mois, j’évoquais avec vous la présence de l’esport dans l’espace public avec un cas particulier : La Source.
Le projet est encore en création et reste loin des standards que l’on connaît aujourd’hui.
Le cas le plus commun va être celui que je vous propose d’analyser aujourd’hui. Les bar esports, sont comme le nom l’indique, des bars, thématiques pour la plupart, axés sur le jeu vidéo et l’esport.
Le Meltdown, est devenu à sa création, le premier lieu de rendez-vous permettant aux fans d’esports, de dépasser le seul lien d’un Teamspeak ou aujourd’hui d’un Discord, pour échanger, partager, regarder de l’esport en se réunissant physiquement.
Jusqu’ici, la communauté a toujours vécu au travers de rendez-vous ponctuels, en tête de liste les LAN, mais aussi les rassemblements communautaires.
L’arrivée de barcrafts a apporté une autre dimension à l’esport et son assertion dans l’espace public. Cela fait maintenant 7 ans que le concept est né et depuis, vous avez sûrement déjà vu ou même franchi le pas d’une de ces enseignes.
À l’intérieur, il est possible comme dans n’importe quel bar de boire un verre, de s’amuser et faire la fête, mais aussi de regarder de l’esport sur des écrans comme on regarde du football, de jouer sur des pc ou des consoles, mais aussi participer à une rencontre compétitive avec les autres clients du bar.
Une véritable communauté s’est constituée autour des Meltdown, mêlant la passion pour l’esport à un esprit festif, omniprésent dans les bars thématiques existant aujourd’hui en France.
À l’origine de ce projet, une personne qui est encore aujourd’hui, au centre de l’activité esport en France : Yann-Cédric Mainguy. Actuel directeur esport chez GamersOrigin, il a lancé en mai 2012 le premier Meltdown à Paris. Face au succès rencontré, l’établissement a changé d’emplacement pour un plus grand local dès décembre 2013.
Le succès rencontré est réel et le petit bar esport parisien devient une firme investissant sur la province et l’internationale.
Depuis l’explosion des Meltdown, Yann-Cédric a pris du recul pour investir son temps sur GamersOrigin et d’autres projets dans l’esport.
Alors que la professionnalisation de l’esport est copiée sur le sport traditionnel, il est possible de s’interroger sur la légitimité d’un barcraft pour fédérer la communauté. Pour autant, il n’existe pas d’autres solutions pour les amateurs s’ils désirent se réunir pour apprécier une pratique sans être dépendant de leurs moyens privés.
Pourtant, le visage de la franchise a beaucoup changé depuis son lancement. En répondant à la demande de consommation des fans, le Meltdown s’est retrouvé comme tout le secteur, confronté à l’ascension continue des influenceurs, au gaming et son influence dans une plus grande mesure.
La communauté est croissante, jeune et pleine de promesses. D’autres personnes ont investi dans le modèle de barcraft, en France et dans le reste de l’Europe, pour essayer de saisir une opportunité désormais exploitable. Partout, des bars gaming viennent suppléer aux Meltdown et faire concurrence à la firme esport.
Désormais, le modèle du Meltdown se mélange aux nombreuses propositions qui sont aujourd’hui en compétition pour séduire leur clientèle.
Yann-Cédric Mainguy n’a pas terminé son aventure à la tête d’établissement accueillant la communauté esport. Depuis 2 ans déjà, il a lancé avec son associé un restaurant, le Güru.
Lieu de rendez-vous du gratin esportif, il mélange les joueurs professionnels, streamers, youtubeurs, investisseurs et autres passants voulant profiter d’un bon repas.
Le modèle est très éloigné de celui mis en place avec le Meltdown, peut-être même aux antipodes.
Pourtant, il permet une nouvelle fois à la communauté de trouver un lieu d’implantation dans la capitale, d’investir l’espace public, mais cette fois de manière parfaitement inclusive.
L’esport devient une pratique de plus en plus mainstream, on l’évoquait en parlant de la structuration de l’identité visuelle de l’esport. Le Meltdown, exclusif à ceux qui osent braver son enseigne fluorescente, répond à la demande d’une communauté qui cherchait encore un phare pour se réunir.
Le Güru peut être une simple bouteille à la mer, mais aussi un modèle d’intégration de la communauté au sein de la société civile. L’esport de demain peut-être celui qui ne dépend plus des rendez-vous pour se sentir vivant, mais un esport du quotidien.
Une piste non négligeable que j’aimerais retracer avec vous dans cette interview en compagnie de Yann-Cédric Mainguy. En découvrant son parcours, celui du Meltdown jusqu’au Güru, il est possible d’en apprendre plus sur nos habitudes communautaires de réunion et d’échange une fois en dehors de la compétition pure.
Salut Yann, tu es à l’origine de nombreux projets en plus de ton activité chez Gamers Origin, j’aimerais me concentrer ici sur le Meltdown et le Güru. Est-ce que tu peux nous raconter un peu l’histoire qui t’a amené jusqu’à la création de ces deux établissements ?
J’ai inventé le concept de bar esport avec le Meltdown en 2012, à la base en m’inspirant des barcrafts américains. Il s’agissait de bars traditionnels, accrochés par des aficionados d’esport qui voulaient suivre Starcraft sur des écrans.
Ce sont de grands espaces avec beaucoup d’écrans dans lesquels il est possible de réunir jusqu’à 600 personnes, à l’image d’une tradition issue du baseball ou du football américain.
En partant de ce modèle et étant moi même fan de Starcraft, j’ai voulu faire la même chose en Europe. Je ne voyais pas pourquoi nous ne serions pas capables de réunir les fans dans un bar pour du Starcraft ou du League of Legends, même si à l’époque le jeu de Riot n’en était qu’à ses prémices.
Le projet s’est monté avec des amis sur Paris, Zaboutine, Ogard, des noms que l’on connaît encore aujourd’hui dans l’esport. Nous étions tous chez Millenium à cette époque.
Dans un premier temps, on a fait plusieurs événements dans Paris, en simultané de ceux proposés par O’Gaming, mais ils avaient déjà une plus grande envergure. Les débuts se sont bien passés, j’imaginais pouvoir faire ce genre de rendez-vous toutes les semaines, dans pleins de bars différents et pourquoi pas dans d’autres villes et un peu partout en Europe.
Finalement, les bars traditionnels ne voulaient pas vraiment faire autre chose que du sport traditionnel. Ils n’étaient pas spécialement intéressés par une clientèle plus geek et malgré les recettes de ces soirées, l’idée restait pour eux anecdotique.
La plupart d’entre eux ont refusé de continuer de faire ces soirées avec nous, il fallait soit abandonner l’idée, soit avoir une autre solution.
C’est grâce à ce besoin que j’ai eu l’idée d’acheter mon propre bar et de lancer une thématique avec de l’esport 7 jours sur 7.
Je n’ai pas voulu proposer que du Starcraft, il fallait s’ouvrir à toute la communauté esport en commençant par League of Legends, Shootmania allait sortir et était prévu au menu. On en avait pour toutes les communautés, le concept a bien pris et il a évolué jusqu’à la firme que l’on connaît aujourd’hui.
Le Meltdown a été le premier bar esport au monde. On aurait pu imaginer qu’il existe déjà une formule aux États-Unis, en Corée ou dans d’autres pays où l’esport est particulièrement implanté, mais ce n’était pas le cas.
Pour le Güru, il y avait de ma part une envie de continuer à avoir un établissement dans lequel je pouvais recevoir mes amis et retrouver la communauté qui nous entoure.
À l’époque du Meltdown, j’ai rencontré Christian, actuel gestionnaire du Güru. C’était un fan de jeu vidéo qui venait au Meltdown comme simple client. Nous nous sommes très bien entendus durant ces années et lorsque j’ai quitté le Meltdown, lui était déjà dans la restauration depuis plusieurs années.
J’ai été régulièrement le voir dans son restaurant, il gérait l’établissement sans en être le propriétaire. À mon départ du Meltdown, il voulait aussi quitter son restaurant pour devenir propriétaire de son propre établissement. Nous avons décidé de nous associer, lui comme gérant moi comme investisseur, ce qui a permis l’ouverture du Güru en juin 2017.
Le Güru est réputé auprès de la communauté des influenceurs et des acteurs de l’esport parisien alors que son apparence ne laisse rien transparaître. Qu’est-ce qui a donné l’envie à cette communauté de s’attacher au Güru plus qu’au Meltdown ?
Il ne faut pas oublier que j’ai été à la tête du Meltdown pendant 3 ans, j’étais la personne à contacter lorsqu’il s’agissait de faire la fête pour la communauté esport.
Pour l’ouverture du restaurant, j’ai naturellement fait appel ma communauté sur mes réseaux sociaux et toutes les personnes qui me suivaient depuis le Meltdown ont été mises au courant.
Le Güru était un peu the place to be et le monde amène le monde. Les amateurs du Meltdown sont venus, Christian réussit à créer sa propre communauté par dessus la mienne, car il sait recevoir, de fil en aiguille, c’est lui qui a réussi à développer notre clientèle.
Au lancement du projet Meltdown, comment est-ce que tu appréhendais l’aspect thématique très marqué dans le design, les couleurs, la carte ?
Cela peut surprendre, mais à l’époque, le projet s’est construit de toute pièce de bric et de broc. Chaque jour, nous avions une nouvelle idée, nous inventions de nouvelles choses, on cherchait de nouvelles façons de faire venir des gens.
On voyait ce qui fonctionnait ou ne fonctionnait pas et chaque jour, de nouvelles tentatives remplaçaient les précédentes. Très souvent, on revoyait la disposition, l’emplacement pour les consoles, l’espace alloué autour du bar. On testait toujours et grâce aux résultats, on continuait d’évoluer.
Au début on avait bien réfléchi à ce qu’on voulait faire, mais entre le moment où l’idée a germé et le lancement du bar, il n’y a eu qu’un seul mois pour tout faire. Dans ce très court laps de temps, il nous a fallu acheter l’emplacement, créer la société, développer le concept.
Pour te donner une idée, le jour de l’ouverture, il n’y avait ni internet ni TPE, on avait tout juste l’électricité. Sur les écrans de diffusions, j’avais préparé une boucle de matchs téléchargés sur une clé USB qui tournait assez longtemps pour aller de l’ouverture à la fermeture.
C’était vraiment spécial et progressivement, avec l’évolution du projet, on a créé quelque chose de plus complet pour l’identité du Meltdown. On était loin du projet abouti que l’on retrouve aujourd’hui, c’était avant tout une idée ; lancer un bar esport avec des copains qui a très bien fonctionné.
Au bout d’un an, nous avons lancé la franchise des Meltdowns, la loi imposait d’avoir quelque chose d’identique dans chaque établissement. On avait largement eu le temps de tester ce qui fonctionnait et ce qui ne fonctionnait pas ce qui nous a permis de faire avancer le projet vers une nouvelle étape.
La communauté de base du Meltdown, mais aussi celle du Güru a sûrement changé avec le bouche-à-oreille et l’ampleur du projet. Est-ce qu’à un moment donné, le noyau de base s’est vu rattrapé par un grand public toujours plus demandeur ?
Les deux ne sont pas comparables dans leur évolution. La communauté du Meltdown était très jeune, tout juste sortie du lycée ou de la fac, ils venaient pour pouvoir jouer.
Le Güru, c’est avant tout un restaurant, tu viens pour manger, boire un verre, la philosophie est très différente.
Tu peux venir au Meltdown en sachant qu’à 18h, tu vas pouvoir faire une partie de League avec des potes. On ne s’attribue pas l’espace de la même manière et les gens ont trouvé ce qu’ils voulaient dans le Meltdown.
Le tout premier Meltdown faisait 40m² à République, lorsque l’on a déménagé, notre communauté d’origine était beaucoup moins attachée au nouvel établissement. Auparavant, le barman était au contact des clients, la perte de cette promiscuité avec la clientèle, au rapport un peu privilégié entretenu avec la première communauté, les a amenés à moins fréquenter le bar.
Petit à petit, c’est une nouvelle communauté qui s’est regroupée autour du Meltdown, puis une nouvelle chaque saison. J’ai l’impression que les saisons d’habitués correspondent à la rentrée des classes.
Il arrivait que certaines personnes se voient comme des habitués, mais ils étaient surtout les habitués d’une saison.
Je développais beaucoup la franchise à l’internationale et lorsque je revenais dans l’établissement, je ne retrouvais aucun des habitués que je connaissais.
Cette appropriation du lieu était réelle, elle se faisait par de nouveaux groupes de gens, le mouvement était constant.
La saisonnalité des jeux avait un rôle important dans l’implication des groupes de joueurs au Meltdown. J’imagine que l’année dernière, Fortnite a pris d’assaut les bars et que la communauté a largement pris possession de l’espace.
C’était la même chose pour Starcraft II ou League of Legends, au moment des Worlds on ne parlait plus que du MOBA.
L’accès aux consoles et aux PC est central pour l’attractivité du Meltdown, les événements sont réguliers et permettent à des gens qui ne connaissent pas ce concept de bar esport de découvrir et de s’attacher à cet espace dans leur ville.
On avait de vraies ambitions sur l’aspect événementiel. On voulait porter l’esprit de club local avec les différents bars, promouvoir des champions, comme le propose actuellement l’Overwatch League et le sport traditionnel.
J’imagine que le format existe déjà avec les clubs de billards ou de fléchettes dans les bars. Ce format a créé une hype autour des Meltdown, mais ce qui a fait son succès, c’est l’ambiance et la possibilité de pouvoir faire la fête.
Les geeks qui ne se retrouvaient pas dans les bars traditionnels ont eu l’opportunité de voir leurs potes en restant naturels. Qu’ils veuillent s’habiller dans un style spécifique, parfois en cosplay, personne ne viendrait les juger et ils avaient cette possibilité de s’amuser. La communauté esport voulait vraiment avoir un chez-soi qu’elle ne trouvait nulle part ailleurs.
C’est d’ailleurs l’énergie que dégage l’enseigne dès le premier regard à l’extérieur. Le vert presque fluorescent de l’enseigne, les bidons qui servent de tables, le design du bar, on a une image assez exclusive pour le grand public.
L’identité de marque s’est créée dès le nom autour du thème nucléaire. Le Meltdown est lui même une référence à la catastrophe nucléaire et nous avons tourné autour de cette thématique.
On avait peut-être envisagé un nom en référence à Fallout avec l’abri 51. Cet aspect steampunk d’un abri antinucléaire apportait une forme de proximité, une identité forte qui pouvait paraître rebutante pour l’extérieur, mais qui était pleinement assumée pour affirmer notre bar à thème.
À l’inverse, le Güru est très ouvert, l’été, les portes-fenêtres permettent de créer de nombreuses ouvertures dans l’établissement. Cet espace, on peut facilement se l’approprier et la communauté esport se mélange sans accroc avec le reste de la clientèle. Pour autant, est-ce que tu as connaissance d’un événement qui a pu faire ressentir la différence entre les personnes présentes ?
Je ne suis pas tout le temps au Güru, mais il ne me semble pas avoir constaté ce genre de cas. Les gens qui viennent au Güru ne parlent pas forcément de gaming et on a une vraie mixité.
D’une table à l’autre, on peut trouver des discussions très diverses et il n’y a aucune tension, aucune appropriation par la communauté de l’espace. Il n’y a pas de démonstration extérieure d’une appartenance communautaire.
Il est déjà arrivé que le Güru soit privatisé pour des événements gaming, ROG, mais aussi 2K, mais dès que l’on privatise, il n’y a plus de questions d’échanges puisque le restaurant est fermé au public.
Je n’ai pas vu de scission entre deux communautés. À une certaine époque, c’était même marrant de voir que l’on recevait des couples pour manger. D’une table à l’autre, on voyait un streamer avec un youtubeur, sur leur gauche, un patron de boîte, encore derrière, un joueur esport.
Il n’y a jamais eu de regroupement au sein de l’établissement entre les gens de la communauté. Le mélange était très homogène, ceux qui viennent au Güru savent qu’ils sont bien accueillis et c’est la raison principale de leur venue.
On voit souvent des personnalités de Twitch ou de l’esport faire des photos au bar ou échanger sur leurs soirées au Güru. Vous n’avez jamais été embêté par des fans un peu trop zélés qui viendraient uniquement pour rencontrer leurs streamers favoris ?
Le Güru n’a pas une assez grande réputation pour que le grand public sache que les stars du jeu vidéo viennent manger chez nous. Il est déjà arrivé que Gotaga et Skyyart soient venus, deux trois passants sont venus pour un autographe, mais cela restait très ponctuel.
J’ai une anecdote assez marrante, il me semble lors de l’anniversaire de Gotaga. Plusieurs personnes avaient été invitées et un des voisins du restaurant avait fait appel à la police pour le bruit.
Lorsque le policier est arrivé pour constater du problème, nous avons expliqué la situation avec lui. Il a rapidement compris la situation et lorsqu’on lui a expliqué qui étaient à l’intérieur, il nous a avoué que son fils était un grand fan de Skyyart et nous a même demandé s’il pouvait avoir un autographe.
Christian a demandé à Skyyart qui a même été jusqu’à faire une face cam avec le policier pour son fils. Évidemment l’incident s’est très bien terminé et l’ambiance était chaleureuse, le fils du policier était dingue de voir son père avec son streamer favori.
On parle de bar esport et de restaurant, je pense à la récente polémique autour de l’arrivée de Bud Light comme sponsor de l’Overwatch League. La question de l’alcool dans l’esport est très similaire à celle posée pour le sport traditionnel.
On l’accepte dans les bars, mais très mal dans l’espace public. Est-ce qu’en dehors du projet Meltdown ou du Güru, tu as déjà eu affaire à des marques d’alcool qui cherchaient à investir dans l’esport ?
Il y a quelques années, on avait eu affaire à Bud Light pour Purple, notre joueur Hearthstone chez GamersOrigin. La marque avait fait un grand sondage pour connaître les joueurs intéressés par un sponsoring de la marque. Purple est canadien et Bud Light cherchait à s’implanter dans l’esport en Amérique du Nord.
On retrouvait dans la liste les plus gros joueurs et streamers Hearthstone américains, Purple faisait évidemment partie de la liste.
Il n’a pas été choisi pour le sponsoring, mais GamersOrigin avait dû signer un contrat, dans le cas échéant où Purple viendrait à être sélectionné, pour que cette nomination se fasse en son nom propre et pas pour la structure.
On avait dû se poser la question à l’époque sur un sponsor issu de l’industrie de l’alcool. Ayant été à l’origine d’un projet comme le Meltdown, je n’avais pas d’a priori sur la question. Avec ce genre de sponsor, il faut prendre en compte l’accessibilité des compétitions esport, aujourd’hui n’importe qui peut regarder un match sur Twitch.
La question, principalement pour les organisateurs de tournoi, c’est de savoir s’ils sont d’accord de faire la promotion d’une marque d’alcool devant des enfants. D’un autre côté, on retrouve sur de nombreuses chaînes de sports des spots publicitaires pour de l’alcool et il n’y a pas plus de modérations que sur Twitch.
Pour terminer cette interview, j’aimerais connaître ton avis sur l’avenir possible des bar esport ?
Depuis mon départ du Meltdown, j’ai perdu beaucoup de lien avec l’évolution du modèle. J’avais néanmoins l’impression que la hype autour des barcrafts était redescendue. La plupart des franchisés avec qui je suis resté ami m’ont donné le même retour.
Le concept de bar esport traditionnel lancé en 2012 ne fonctionne plus autant. Désormais, la demande se tourne plus vers les bars geek, les fans hardcores d’esport sont moins représentés.
J’ai même eu la possibilité de voir des bars geek se détacher de l’esport, ne plus montrer de match pour favoriser la tendance que l’on retrouve dans l’esportainment.
Je suis très content de voir que dans les grandes villes d’Europe et du monde, j’ai inventé un lieu où les geeks peuvent se retrouver et parler d’esport.
Depuis mon départ en 2015, le Meltdown comme l’esport ont beaucoup changé. Mon approche de l’esport et celle de GamersOrigin s’appuient beaucoup sur les joueurs, la compétition pure, alors qu’aujourd’hui, on cherche beaucoup plus des structures avec des influenceurs ambassadeurs.
Merci Yann pour ton témoignage.
Le modèle des barcrafts a beaucoup évolué, en réponse à une demande toujours plus croissante. La communauté cherchait un lieu où partager de l’esport, aujourd’hui, le seul prétexte de la compétition est dépassé par l’intérêt commun au jeu vidéo.
Néanmoins, il est possible d’envisager dans les barcrafts, une véritable énergie autour de la compétition, comme le propose les clubs sportifs pour les amateurs de sport.
Le barcraft ne peut pas tenir la promesse de performance ou d’excellence que veut vendre l’esport, mais il peut néanmoins assurer à la communauté son existence dans la vie civile. Aujourd’hui, n’importe qui peut avoir conscience de l’existence de l’esport grâce à ces enseignes.
Très peu vont franchir le pas, ne serait-ce que pour boire un verre, mais ils n’auront pas d’autres choix que de reconnaître qu’il existe dans leur ville, une communauté de fans, identifiés dans un lieu spécifique.
Des initiatives comme la Source viennent compléter cet investissement de l’espace public, en proposant une offre moins divertissante, mais plus professionnalisante. Les deux offres, loin de se concurrencer, participent à la popularisation de la pratique vers le grand public. Bien qu’il existe une baisse d’intérêt pour les barcrafts purement esport, il est désormais indéniable que leur place dans la communauté a permis durant ces 6 dernières années de valoriser l’esport et ses pratiquants comme communauté.
N’hésitez pas à suivre Yann-Cédric Mainguy, son travail chez GamersOrigin ou dans différents projets est visible sur son Twitter.
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