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Nicolas Besombes : »Il faut valoriser le patrimoine esportif »

Par Lenaic Leroy
Nicolas Besombes patrimoine esportif

Que savons-nous vraiment des débuts de l’esport, de son évolution comme secteur de niche jusqu’à cette bulle économique entretenue par les éditeurs ?

À vrai dire, pas grand-chose.

Pourtant, des livres sur l’histoire de l’esport, il en sort un chaque année. Publiés par des journalistes, des entrepreneurs, parfois des joueurs, ces ouvrages procèdent comme la majorité des publications du web, à vulgariser l’écosystème en réunissant un certain nombre de sources d’informations issues du patrimoine esportif.

Des sources, il y en a des tas à l’époque du numérique : documents écrits, images, vidéos, emails, affiches, tracts, tweets, témoignages… Absolument tous les faits et gestes relatifs au secteur sont sujets à être la source d’une histoire de l’esport.

Pourtant, la principale source de travail (celle que l’on valorise en premier lieu sur Esport Insights), c’est le témoignage par l’interview.

Il y a de très nombreux avantages au témoignage, puisqu’il permet de connaître l’appréhension d’un acteur spécifique sur le secteur, afin de comprendre les particularités d’un sujet.

Cependant, un témoignage ne reflète que la seule perception de l’acteur et reste donc très limité.

Malgré la très grande diversité des sources potentielles, la réalité est bien différente.

Aujourd’hui, malgré la production titanesque de sources, le nombre d’entre elles qui viennent à être conservées est très minoritaire.

Plusieurs facteurs expliquent cette situation qui n’a rien d’anodin, en voici deux qui sont particulièrement visibles.

En premier lieu, la possession de moyens conséquents pour mener à bien le travail de conservation des sources, qu’elle soit physique ou numérique avec un espace de conservation.

Dans un second temps, l’éducation de tout un secteur privé à des problématiques d’archivages et de protection du patrimoine esportif, alors que sa principale activité reste le développement individuel de chacun des acteurs qui le compose.

Dans les faits, si vous voulez commencer à creuser pour en savoir plus sur ce qu’était l’esport il y a 5, 10 ou 20 ans, vous serez immédiatement confronté à une histoire fragmentaire.

Les curieux imprévoyants, viendraient à penser que ce qu’il reste de notre histoire, suffit à expliquer les événements du passé, sans réaliser que les lacunes déjà existantes, sont essentielles pour comprendre l’ensemble du paysage que l’on observe.

Pour vous donner un exemple que j’ai moi-même vécu, revenons en 2018, lors de la Dreamhack Tours.

Au sein de la liste des tournois, je devais m’occuper du suivi de la compétition sur Starcraft II.

Quelque temps avant l’événement, je me renseignais sur le cashprize, le nombre de places et le format de la compétition.

L’événement n’avait pas eu lieu que déjà, les sources d’informations étaient diffuses et presque parfois inexistantes.

Je mis finalement la main sur le cashprize, des goodies de Blizzard d’une valeur avoisinant la centaine d’euros. Rien de glorieux, mais passons.

Une fois sur place, j’obtiens des admins de tournoi, toutes les informations qui doivent me permettre de compléter mon article.

Vous trouverez encore aujourd’hui cette brève sur Connectesport et si vous cherchez le nom du vainqueur, il s’agissait de Stephano.

Prêt à savourer sa victoire, il reçoit de l’organisation son prix, et quelle surprise ? Il ne semble pas que les équipes de GamersOrigin étaient prêtes à voir ce genre de récompenses venir, d’autant plus qu’elles n’étaient pas du tout celles annoncées !

https://twitter.com/go_guillaume/status/997883146787008514

Cette petite histoire n’est pas restée disponible sur le suivi de la compétition, et seul le tweet de Guillaume Merlini peut encore nous donner un aperçu de la mésaventure.

Pourtant, elle avait fait grand bruit durant l’événement, couplée aux problèmes de connexion et d’organisation.

Peut-être étiez-vous déjà au courant de cette petite aventure. Pour autant, il existe assez peu de sources encore visibles qui permettent de confirmer sa véracité.

Avec plus de méthode, il aurait été possible de savoir avec exactitude ce qui était en jeu lors de ce tournoi. C’est ici que la problématique de l’archivage est centrale.

Le cas choisi est anodin, mais il s’applique à des choses beaucoup plus importantes. Petit à petit, par manque de méthodologie, nous perdons des connaissances essentielles du secteur que l’on côtoie aujourd’hui.

Des sites comme Liquipedia sont des moteurs de notre écosystème et je pense qu’aucun acteur du secteur ne viendra me contredire à ce sujet. Pourtant, rien ne prévient la disparition d’un tel site et la quantité de données qu’il renferme peut à tout moment nous échapper.

Le problème est global et demande de nombreuses réponses pour évoluer vers une plus grande protection du patrimoine esportif.

Le sujet est assez actuel, puisqu’en septembre, France Esports a décidé de s’attaquer à ces questions à bras le corps lors de son assemblée générale.

Dans un échange avec Nicolas Besombes, nous avons pu faire un tour d’horizon des cas spécifiques à l’esport français, des possibilités qui semblent se profiler pour que tous les acteurs agissent en commun à la conservation de nos ressources.

separateur rose esport insights

Salut Nico, la question de l’archivage du patrimoine esportif est revenue à l’assemblée générale de France Esports, tout particulièrement suite à l’annonce de fermeture du site Actu-lan.

Tu connais déjà l’enjeu des sources à travers ton travail d’enseignant-chercheur universitaire. Les sources sont au cœur de la recherche et il existe déjà dans le milieu des difficultés même pour des spécialistes comme toi dès qu’il s’agit de mettre la main sur un document.

Il y a plusieurs difficultés académiques. La majorité des auteurs pour avoir une rémunération sont amenés à vendre leurs droits à des revues. Ces revues sont coûteuses et ne sont pas toujours mises à disposition par les universités.

Sans cet abonnement, le contenu est inaccessible et en ce qui concerne l’histoire de l’esport, les sources sont encore majoritairement privées.

Jason Delestre et Samuel Padou ont fait beaucoup de recherches sur les sources. Jason fait reposer son travail sur un énorme corpus de texte qui permet de mieux comprendre les questions de relations internationales.

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Samuel a fait plusieurs interviews des principaux fondateurs d’institutions esportives comme Mathieu Dallon ou Angel Munoz. Ces témoignages sont essentiels pour avoir une trace d’une période où aucune trace ne persiste.

On a une première période où des traces papiers existent, souvent pour la période précédant les années 2000. Par la suite, on retrouve beaucoup plus de ressources numériques et surtout des témoignages d’acteurs.

Le témoignage est une bonne source qui comprend toutes les limites de la mémoire humaine. Il est difficile d’avoir confiance en son propre cerveau et il faut savoir lire entre les souvenirs embellis, les oublis, pour comprendre ce qui s’est réellement passé.

Pour essayer de dresser une image plus nette, il est nécessaire de recouper les différents témoignages sur un même événement.

Chaque histoire est différente et les regards s’entrecoupent, c’est ce qui rend le sujet aussi intéressant. On le voit avec le cas de la CLP.

Les débuts balbutiants sur Quake sont en réalité un projet très réfléchi du côté d’Angel Munioz, mais il est compliqué de savoir à quel point avec le recul et dans son imaginaire, cette réussite est fantasmée par l’appropriation du phénomène populaire.

Le sujet de l’archivage du patrimoine esportif a été évoqué lors de l’assemblée générale de France Esports, qu’est-ce qui a été prévu pour travailler cette thématique ?

Cela fait longtemps que je pousse cette question au sein de l’association. En discutant avec Dorian Costanzo et Ludwig lors de la Gamers Assembly 2018, Ludwig nous racontait une anecdote.

Durant une compétition, il avait vu un joueur jeter sa médaille à la poubelle. Il avait alors récupéré la médaille et l’a depuis conservée.

Il était choqué de voir que les joueurs n’attachaient aucune importance à la victoire et à la potentielle symbolique autour, mais uniquement au gain financier qui était leur principale source de motivation.

Depuis, Ludwig fait en sorte de garder toutes les ressources qu’il peut obtenir lors des différents événements qu’il visite.

Depuis cet événement, nous avons fait le constat que rien n’était mis en place pour préserver le patrimoine esportif et l’histoire de l’esport en France.

La réflexion a fait écho au sein du bureau de France Esports pour Emmanuel Martin qui considère de manière plus globale la conservation du jeu vidéo comme un enjeu. De plus, des membres de l’association qui sont présents dans le secteur depuis des années maintenant, sont sensibles à cette thématique et conservent déjà de manière privée de nombreuses ressources.

Je peux penser à Mathieu Dallon qui possède beaucoup de matériel de l’ESWC, Samy Ouerfelli pour l’ESL ou Stephan Euthine qui conserve toutes les ressources de l’histoire du club LDLC.

On a beaucoup parlé du MO5 pour l’archivage du jeu vidéo. Ce que j’observe en voyant le travail qu’ils font, c’est la nécessité de développer un espace dédié à la conservation de ces sources.

L'association MO5 s'implique dans la protection du patrimoine vidéo ludique avec comme finalité, la création d'un musée national des cultures numériques. Source : Le Monde

L’association MO5 s’implique dans la protection du patrimoine vidéo ludique avec comme finalité, la création d’un musée national des cultures numériques. Source : Le Monde

Il faut pouvoir stocker les objets disponibles, que ce soit les affiches, les coupes, les médailles, toutes les productions qui sont propres à l’esport.

Aujourd’hui France Esports ne possède pas un tel espace de stockage. La préservation de la culture esportive nous questionne aujourd’hui et surtout, elle nous donne envie de nous en emparer.

C’est un travail très long qui demande de la recherche, l’étiquetage et le référencement de toutes les ressources.

À terme, France Esports va chercher à avoir un espace physique pour protéger le patrimoine esportif matériel de l’esport et par la suite, développer la protection du patrimoine esportif numérique.

La question s’est concrétisée lors de l’assemblée générale au travers de la feuille de route du prochain mandat. Un de nos axes, le développement d’un esport durable, comprend toute une thématique sur la conservation qui va de pair avec le sujet de l’archivage.

La finalité serait de faire de France Esports un centre de ressources.

Nous prenons exemple sur les fédérations sportives ou le comité olympique. On trouve dans les locaux de ces institutions, toute la partie administrative, mais aussi des espaces de conservation et d’exposition de nombreuses ressources propres à leur pratique.

Il faut valoriser le patrimoine esportif et pas seulement le thésauriser.

Est-ce qu’aujourd’hui il existe déjà une forme de collecte de la part de France Esports pour que les sources du patrimoine esportif qui viennent à paraître soient conservées ?

Il y a une collecte d’information, mais elle n’a pas été pensée dans ce sens.

Aujourd’hui, il existe sur le site de France Esports un espace qui permet aux organisateurs de mettre leur événement dans un agenda, laissant une trace au sein de nos ressources.

De la sorte, nos visiteurs peuvent accéder et obtenir des informations que les acteurs nous remettent.

Il y a un véritable travail d’éducation à prendre en compte, à la fois chez les membres de France Esports, mais aussi de tous les acteurs de l’écosystème français.

Ces acteurs privés possèdent de nombreuses données et sont les seuls garants de leur protection. Je sais que l’ESWC a fait un gros travail sur la conservation de leurs ressources.

Ils ont fait appel à Philippe Rodier pour pérenniser toutes ces informations. Il a récupéré plus de 3-4 TO de données qu’il a triées, référencées et classées.

J’adorerais voir à chaque nouvelle production les acteurs fournir un doublon, une copie ou même les patrons du produit, pour que France Esports conserve ces informations.

Aujourd’hui, lorsqu’un jeu vidéo est créé, les éditeurs ont l’obligation d’envoyer une copie à la BNF pour sa conservation.

Dans la logique de patrimonialisation de la culture par l’Etat, il devrait y avoir plus de sources issue du patrimoine esportif et vidéo ludique comme pour l’industrie musicale ou cinématographique. Dans ces deux industries, la collecte est automatique et minutieuse des sources.

Il existe des débats de légitimation de l’esport qui embourbe le secteur. Malgré une certaine forme de reconnaissance officielle de l’Etat, on ne dépassera pas avant plusieurs années les problématiques de reconnaissance du jeu vidéo dans sa globalité.

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On voit des expositions sur le jeu vidéo se développer, la collection de la BNF croître, différent type d’indicateurs qui renforce la position de cette industrie, mais de nombreux avis freinent encore sa reconnaissance culturelle.

En 2008, lorsque la crise a frappé l’esport, la pratique était encore de niche et personne n’était sûr de voir l’industrie se relever de manière pérenne.

Pour certains, l’esport est encore un simple effet de mode et ils ne voient pas l’intérêt de conserver l’histoire de quelque chose qui viendra quoi qu’il arrive à disparaître.

C’est pour cette raison toute particulière qu’il est essentiel de conserver les sources de l’écosystème.

La seconde problématique, le numérique que l’on parvient progressivement à mieux maîtriser. Auparavant, la conservation ne dépendait que de patrimoine matériel. Il a été nécessaire pour tout le secteur de l’archivage d’effectuer une révolution dans ses méthodes pour prendre en charge toute la ressource numérique.

De plus pour l’esport, quelle instance serait capable de prendre en charge ce besoin ?

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Lors de l’assemblée générale de France Esports en septembre 2019, le développement d’un esport pérenne était au cœur des débats avec un regard attentif sur la protection du patrimoine esportif. Source : France Esports

Dans le sport, les fédérations et l’Etat de manière indirecte font ce travail de conservation. Aujourd’hui, seuls les éditeurs sont en mesure de faire la conservation de leurs circuits compétitifs.

En revanche, qui va s’occuper de conserver l’histoire des compétitions sur League of Legends en dehors des sentiers battus par Riot Games ?

Avant l’Open Tour, Riot Games ne prenait en charge aucune compétition en France, ces sources n’ont aucun garant de préservation.

C’est un enjeu pour France Esports, car personne n’avait pris la question au-delà de son intérêt personnel.

La protection du patrimoine esportif est un enjeu très marqué dans le secteur bien qu’il soit plus global.

Deux solutions sont possibles, de l’intérieur comme de l’extérieur. France Esports peut devenir le vecteur qui permettra aux acteurs d’avoir un point d’attache commun en matière de conservation, soit le gouvernement au travers de la DGE décide qu’il est nécessaire de conserver l’esport.

Aujourd’hui, la thématique n’a pas été particulièrement identifiée par la DGE, il est donc important que France Esports prenne le pas dans la matière, d’autant plus que certains acteurs sont attentifs à la problématique.

La situation est déjà complexe, car des informations simples comme un résultat de tournoi sont parfois inaccessibles au moment de l’événement. Plus le temps passe, plus le patrimoine esportif se perd, rendant la collecte toujours plus difficile.

Il s’agit une nouvelle fois d’éduquer les acteurs du secteur sur le sujet.

Récemment, une étude sur la présence des femmes sur la scène compétitive française a été mise en place avec différents organisateurs d’événements.

Plusieurs organisateurs n’étaient pas en capacité de nous fournir la liste des inscrits sur différentes éditions de leur événement.

Il arrive que le fichier soit perdu, que la plateforme de vente de ticket ne soit plus existante, rendant impossible l’extraction de l’information.

À la fin de l’événement, il n’y a pas d’automatisme de conservation des informations, on tourne la page pour préparer la suivante et il faut réussir à développer un savoir-faire pour garder le savoir qui est collectable.

En ajoutant la réforme des supports dans le numérique, il est d’autant plus difficile de réaliser ce travail, car de nombreux sites internet des débuts de l’esport ne sont plus accessibles sur nos machines.

Le sujet a été évoqué en début d’année avec la sortie du livre In Esport We Trust de Arnaud Rogerie. Il avait été particulièrement marqué tout comme Dorian Costanzo par la disparition de l’esport en France avec la crise et ce changement de format numérique.

Très récemment, Dorian Costanzo s’est penché sur la pérennisation du nom des grands champions qui ont marqué et marquent l’histoire de l’esport. Son travail est disponible à tous sur un google sheet public et permet de comprendre plusieurs problèmes méthodologiques, le plus important étant la sélection de ceux qui marque l’histoire d’un jeu année après année. Comme il le souligne avec justesse, des jeux comme League of Legends définissent des champions évidents avec des compétitions comme les Worlds. En revanche, de très nombreux jeux ne possèdent pas de majors à proprement parler et laissent une énorme place à l’appréhension personnelle pour définir quel joueur mérite ou non une place sur cette liste.

Les sites qui ont disparu n’ont laissé aucune trace de ce qu’était l’esport et la majorité des informations repose désormais sur les témoignages.

Comment doit-on faire pour que lors des différentes révolutions du numérique, les informations soient pérennisées ? Demain, lorsqu’un acteur arrête son activité, comment faire pour conserver toute son histoire?

Ces questions sont très importantes et semblent légitimes dans l’action de France Esports. Nous cherchons à fédérer les acteurs et cela passe aussi par la protection de leur histoire.

Il n’y a personne qui peut vraiment faire face à ce problème aujourd’hui et si l’action vient d’un acteur privé, quelle est la garantie de voir un travail bien fait ?

Par l’intermédiaire des acteurs membres de France Esports, je pense tout particulièrement au SELL qui est très connecté à la BNF et au MO5, nous devons pouvoir mettre en place des compétences majeures à la réalisation d’un tel projet.

Traditionnellement, l’archivage passe soit par l’Etat et des instituts développés sur une thématique particulière, soit des acteurs privés qui veulent pérenniser leur histoire dans une logique pragmatique.

Le travail de conservation va être effectué, mais avec une recherche de sens et parfois même d’instrumentalisation de l’histoire, ce qui est très problématique si l’on ne vient pas à questionner l’information qui nous est proposée.

L’histoire devient un outil de communication qui doit être attentivement étudié pour ne pas tomber dans un message politique qui permet de glorifier une institution, une entreprise ou même une personnalité.

La conservation des sources est un enjeu politique. Lorsque j’ai visité le musée olympique à Lausanne, la période des années 30-40 n’était pas mise en valeur, car elle rappelait les Jeux olympiques de Berlin et le nazisme.

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Cette face plus sombre de l’histoire des Jeux olympiques est gommée pour ne garder que la partie la plus radieuse.

Les prestataires des acteurs privés vont forcément devoir répondre à un cahier des charges et apporter à l’acteur privé la plus-value recherchée lors de cette historisation.

À moindre échelle, mais de manière tout à fait significative, c’est un sujet qui a été vu cette année avec les 20 ans de la Gamers Assembly.

Pour réaliser les vidéos et les brochures de l’événement, il a été nécessaire de retracer l’histoire de l’événement. L’appréhension de l’événement se fait à travers les grandes étapes, les jalons marquants de l’histoire, tout en gardant en tête l’ascension inéluctable et sans embûches.

Cet outil devient un véritable argument dans les mains des organisateurs qui peuvent toujours faire valoir une maîtrise du secteur que d’autres ne peuvent pas prétendre connaître.

Cela soulève un autre problème dans la collecte de donnée. Pour réaliser un tel document, il a été nécessaire de remonter 20 ans en arrière et consulter certaines personnes et des collections privées qui ne sont plus dans l’écosystème.

Comment faire pour récupérer certaines sources auprès de personnes qui ne sont plus actives ?

Que ce soit des images, des vidéos ou des films, il y a un très gros travail de collecte qui doit être fait pour réussir à compléter les trous de l’histoire.

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Pour célébrer sa 20eme édition, la Gamers Assembly a fait preuve d’un travail de recherche intensif pour produire sa cérémonie, différents tracts et des vidéos commémoratives des 20 dernières éditions. Source : Aqui

Je pense entre autres à toutes les parutions journalistiques que l’on trouvait régulièrement comme le Journal de l’esport. Seulement trois ou quatre numéros sont sortis et je ne connais pas grand monde qui possède un seul exemplaire ou même la totalité.

Ces rares impressions sont devenues des objets de valeur et il faut des fonds importants pour être en capacité de les racheter à des privés pour en faire la conservation.

La collecte va représenter un des très gros chantiers pour assurer la récupération des sources et nous espérons pouvoir le faire avec les ressources de France Esports.

L’éducation des acteurs est capitale. La majorité des sources ne sont pas divulguées dans une logique de protection des données et il faudra encore attendre des années.

Cependant, comme tu as pu le voir avec les organisateurs d’événements, plusieurs années après, la conservation n’étant pas minutieuse, il est déjà trop tard et la source n’existe plus.

Il faut réussir à convaincre ces acteurs du bien fondé de la conservation du patrimoine esportif où sinon, le schéma ne cessera jamais de se répéter.

Nous n’en sommes qu’au balbutiement chez France Esports, mais je pense que la fermeture du site Actu LAN devrait éveiller les consciences de différents acteurs sur le sujet.

Nous commençons par sensibiliser les différents membres du conseil d’administration et les membres de France Esports pour bien conserver leurs différentes sources.

Désormais, je garde un maximum d’éléments après chaque événement, que ce soit une affiche, un kakemono ou autres éléments périssable, dans l’espoir de pouvoir à terme mettre tous les éléments en commun.

Peut-être que dans 5 ou 10 ans, il sera possible de rendre ces éléments visibles au public.

À l’image du MO5, il serait fou d’espérer voir un jour un musée de l’esport émerger sur le sol français. Cela demanderait néanmoins de très nombreuses ressources qui n’existent tout simplement pas dans le secteur et qui dépendent très largement de la fonction publique.

C’est pour ça que j’évoquais le savoir-faire de MO5 ou de la BNF qui vont être très importants en la matière.

Il s’agit maintenant de la part des acteurs d’être vigilants sur leurs sources et de commencer à récupérer des données qui se perdent.

Quelqu’un doit prendre les devants sur la question et tant que la situation restera telle qu’elle, rien ne changera.

Les choses avancent doucement, les acteurs sont mobilisés et le sujet fait partie de notre feuille de route pour les deux prochaines années.

Merci pour l’interview et bon courage pour mettre en place un maximum au sein de France Esports.

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Vous l’avez compris, l’archivage du patrimoine esportif doit se faire aujourd’hui par des gestes au quotidien.

L’éducation des acteurs passe aussi par l’éducation de tout notre écosystème. Chacun doit savoir mettre en valeur les ressources qui existent pour qu’elles restent disponibles aujourd’hui comme demain.

Les sites d’actualités jouent un rôle clé dans la transmission de l’information et sont les principaux vecteurs du secteur, ils doivent être sauvegardés pour ne pas voir les erreurs passées se reproduire.

Heureusement, des outils existent déjà pour mettre en place un tel dispositif, mais il doit y avoir un organe unificateur comme peut l’être France Esports pour que le modèle de conservation et les normes soient les mêmes pour toutes les ressources.

Les acteurs privés vont se retrouver très rapidement face à des problématiques de conservation comme toute entité qui développe une activité dans le temps.

Il sera alors temps de faire appel à des spécialistes, des archivistes professionnels, qui devront comprendre tout un écosystème jusqu’ici inconnu du domaine des archives, pour le pérenniser.

Il est essentiel de cibler dès maintenant, les priorités en termes d’archivage et les moyens nécessaires pour le faire.

Chaque jour qui passe, mène à la perte de sources vitales pour comprendre ce qu’a été et ce que va devenir l’esport.

Le temps presse, et il est essentiel de remédier à ce problème en mettant en place des moyens qui répondent à nos besoins.

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